Les nouvelles données dévoilées par l’Insee dessinent un pays coupé en deux, un grand écart spectaculaire qui devrait s’accentuer.
Les chiffres posent question et pourraient relancer le débat sur la taxation des plus aisés et des plus âgés, au moment où le Parlement est invité à réaliser de douloureux arbitrages budgétaires pour l’année 2026.
Les inégalités en matière de patrimoine sont criantes en France et elles s’accentuent. Elles sont même « nettement plus fortes que les inégalités de niveaux de vie (les revenus du ménage, NDER) », pointe l’Insee, dans un nouveau rapport rendu public mardi.
Premier constat : le patrimoine brut des ménages s élevait en moyenne à 374.900 € début 2024, observe l’Insee qui dessine une France coupée en deux. Pour la moitié des ménages, il dépasse les 205.000€, l’autre moitié étant située sous ce seuil. Autre leçon, les Français sont plus riches de 9 % qu’il y a dix ans (et les plus aisés de 23 %).
46 % des ménages ont cependant des emprunts à rembourser. Et, stout, ces moyennes masquent un grand écart spectaculaire. Les 10% des ménages les mieux dotés (plus de 857.700 € brut) cumulent, à eux seuls, près de la moitié de la masse totale de patrimoine brut en France. Tout à la fois de biens immobiliers et professionnels (entreprises, terres, bâtiments professionnels, etc.).
Les retraités, les héritiers et les autres
Alors que pour les 10 % des ménages qui possèdent le moins de patrimoine (soit moins de 6.200 €), celui-ci se résume sou-vent à la voiture utilisée au quotidien, l’équipement du logement| et des comptes sur livrets patiemment garnis pour faire face aux coups durs.
Ce patrimoine augmente logiquement avec l’âge. Il est en moyenne de 104.400 € pour les moins de 30 ans, de 464.800 € pour les quinquagénaires. Il atteint son maximum vers 60 ans, puis se stabilise, avant de diminuer à partir de 75 ans. Certains puisent dans leur épargne pour financer de la dépendance, d’autres « font des donations », explique Aurélie Goin, cheffe de la division logement et patrimoine a l’Insee.
Mais les plus de 60 ans détiennent très clairement la majeure partie de la richesse patrimoniale en France et celle-ci est moins taxée que les revenus, fruit du travail des salariés. Ce qui pourrait reposer la question de la répartition de l’effort entre retraités et actifs.
« Mais il y a aussi des disparités assez fortes au sein même des tranches d’âge », souligne Aunélie Goin. Notamment car la France des propriétaires a bénéficié de la hausse des prix de l’immobilier.
Dernier constat : ces inégalités se creusent et ce n’est qu’un début. Avec la disparition des baby-boomers, un transfert massif de richesses va être opéré en France. La fondation Jean-Jaurès l’a déjà chiffré : près de 9.000 milliards d’euros devraient ainsi être transmis, via des successions, d’ici 2040.
Dessinant la perspective d’une France à deux vitesses, ou la richesse dépendra davantage de L’héritage que du travail.
L’Indépendant, le 11 décembre 2025
