Les rats ont ceci de particulier : ils détestent qu’on les nomme notamment celui du navire qu’ils quittent au premier signe de menace. Sophie Binet, secrétaire nationale de la CGT utilise cet adage pour dénoncer ces patrons qui agitent le chantage fiscal.
Les patrons viennent de déclarer : « Taxez-nous davantage et nous quitterons la France. » Une manière de faire pression au moment où l’État cherche des solutions aux déficits abyssaux. Alors que les budgets sociaux sont déjà sacrifiés sur l’autel d’une austérité durcie, le grand patronat, lui, refuse tout effort.
Bernard Arnault a prophétisé une vague de délocalisations si, au regard des bénéfices réalisés, une contribution supplémentaire venait à être exigée. L’homme est coutumier des manœuvres dès qu’il s’agit de préserver les profits que lui rapportent ses 173 000 salariés.
Donald Trump a lancé sa guerre douanière tout en invitant les entreprises étrangères à produire aux États-Unis, son ami, Arnault, a aussitôt répondu présent. Résultat : plus de 20 millions d’euros investis dans une usine de maroquinerie au Texas. Et il n’est pas le seul à avoir fait allégeance au caïd de Washington.
Le groupe pharmaceutique Sanofi prévoit au moins 17 milliards d’investissements aux États-Unis d’ici 2030. Le constructeur automobile Stellantis promet plus de 10 milliards pour moderniser ses usines et lancer de nouveaux modèles là-bas. Le transporteur maritime CMA-CGM annonce un plan de 17 milliards pour construire terminaux et infrastructures logistiques… La liste pourrait encore s’allonger.
Le coup de gueule de Sophie Binet
Ces groupes s’achètent un environnement fiscal plus clément, des réglementations plus souples et des aides publiques généreuses. Ce qui n’était qu’une menace devient soudain une source de profits supplémentaires.
Le patriotisme ? Balayé. Peu importe que le navire industriel France prenne l’eau, manque d’investissements dans la recherche, l’innovation ou la production. Peu importe que l’État leur ait offert des talents formés, des infrastructures de qualité, des services publics performants et 211 milliards d’aides diverses notamment 2023 comme l’a révélé le sénateur communiste Fabien Gay. Ils n’ont même pas la reconnaissance du ventre.
Prenons Stellantis : depuis 2013, le groupe a bénéficié de 14 catégories d’aides publiques – crédits d’impôt recherche, subventions locales… Entre 2020 et 2024, ces soutiens représenteraient près de 400 millions d’euros. Et pourtant ? Cette année, 1 100 postes ont été supprimés. Dans le même temps, les actionnaires touchent 2 milliards d’euros pour l’exercice 2024-2025, et l’ex-PDG Carlos Tavares part avec 34 millions d’euros d’indemnités. Et ce n’est qu’un exemple. Dans ce monde-là, ceux qui quittent le navire ne partent ni les mains vides ni le ventre creux.
Pour avoir rappelé ces faits et utilisé une expression populaire, Sophie Binet se retrouve aujourd’hui sous le coup d’une plainte pour injure public. Cette intimidation judiciaire n’effacera ni les faits ni leurs conséquences pour le pays et pour ses citoyens.
La secrétaire nationale de la CGT est notre voix, elle mérite notre soutien.(*)
Dominique Gerbault
(*) Signez et faites signer la pétition : Soutenir Sophie Binet face à sa mise en examen.
