Un mouvement aux nombreuses inconnues que les acteurs politiques et sociaux appréhendent avec curiosité, prudence, voire inquiétude. État des lieux.
On en parle, à bas bruit depuis ce printemps, avec beaucoup plus d’écho, depuis juillet et, une fois dévoilées les premières mesures d’économies envisagées par François Bayrou, comme du mouvement du 10 septembre. Qui appelle à bloquer le pays à cette date.
Un mouvement initié par des citoyens anonymes s affirmant apartisans, soutenu rapidement sur les réseaux sociaux par des groupes venus d’horizons divers.
Avant qu’il ne soit adoubé, le 17 août, par Jean-Luc Mélenchon, qui appelle à une « offensive déterminée », puis par le coordinateur national de LFI, Manuel Bompard, le lendemain.
Depuis, les Écologistes, les communistes ou le syndicat Sud Rail (qui, jeudi, a affirmé que « le 10 septembre, on bloque tout dans le ferroviaire ») ont confirmé publiquement leur appui.
D’autres organisations syndicales semblent plus partagées, ou indécises, alors que, à l’instar de FO ou de certaines branches de la CGT, des appels à la mobilisation sociale, début septembre, avaient déjà été lancés. Une intersyndicale prévue le 1″ septembre devrait permettre de clarifier les positions.
« Revendications floues »
Certaines unions départementales et fédérations de la CGT (chimie, commerce) ont décidé de ne pas attendre cette date pour se prononcer en faveur du mouvement et prévoient de se mobiliser le 10 septembre. Et ce, dans un contexte où d’autres initiatives émergent, ou sont déjà programmées : les fédérations de taxis disent vouloir « mettre le pays à l’arrêt » le 5 septembre, les pharmaciens envisagent une grève « illimitée des gardes », le secteur de l’énergie sera en grève le 2 septembre et plusieurs syndicats de personnels hospitaliers élaborent plusieurs formes de mobilisation.
Du côté des partis politiques, on marche sur des œufs, entre la peur de passer à un côté d’un mouvement d’envergure, comme cela avait été le cas avec celui des « gilets jaunes », et la crainte d’être visé par des accusations de récupération. Si LFI a mis de l’allant dans son renfort, les communistes et les Écologistes, eux, affirment leur soutien, certes, mais en précisant, a l’instar du porte-parole du PCF, lan Brossat, vendredi dans nos colonnes, qu’ils seront aux côtés de toute action stigmatisant le projet de budget 2026 du Premier ministre.
À gauche toujours, du côté du Parti socialiste, il a finalement été là aussi décidé « d’accompagner » le mouvement pour « lui offrir un débouché politique » de gauche, selon Olivier Faure. Même si « nous n’en connaissons pas complètement les contours » et que « ses revendications sont encore floues », a-t-il prudemment reconnu.
À l’autre bout de l’échiquier politique, toujours dans l’opposition, mais du côté du Rassemblement national, c’est vendredi que le parti a donné sa position officielle, par la voix de sa vice-présidente Edwige Diaz « Notre rôle en tant que parti politique est d’apporter des réponses aux problèmes et aux revendications des gens. Pas de crier dans un haut-parleur », a-t-elle lancé.
Et pour l’instant, sauf exception, rares sont les prises de parole sur le sujet dans les rangs du gouvernement (le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, avait sèchement refusé de nous répondre quand Midi Libre l’avait sollicité, mardi à Nîmes) ou dans le camp présidentiel. Mais pour eux, à n’en pas douter, cette journée fera office de test grandeur nature, au cœur d’une rentrée sociale brûlante.
À la veille de sa conférence de presse prévue ce lundi à 16h, François Bayrou, menacé d’une nouvelle motion de censure, a fustigé le mouvement dans La Tribune Dimanche: « Tout le monde a le droit de protester, mais je ne crois pas que, devant une telle crise, la réponse des Français puisse être de bloquer le pays. » « C’est la chute de la falaise ou le chemin pour s’en sortir », a-t-il déclaré au Parisien, ajoutant que « seule l’adhésion des Français peut changer les choses ».
Vincent Coste (L’Indépendant, le 25 août 2025)