Le billet d’Yvon Huet. Personne n’est parfait

Il m’est souvent arrivé d’écorcher l’aura de quelques leaders politiques, de gauche comme de droite, particulièrement un certain Mélenchon qui pourrait être mon petit frère de deux ans de moins… Je ne fais pas une fixation loin de là et je n’ai contre la personne que je ne connais pas personnellement aucune revanche personnelle à prendre sur quoi que ce soit.

J’en viens à ce qui me chagrine le plus en fait. Quand Marie Georges Buffet, secouée par le score catastrophe de l’élection présidentielle de 2007 avec 1,9 % des votants dans un contexte d’avancée fulgurante du vote FN, elle est allée chercher un éventuel sauveur d’une situation politique désastreuse à gauche comme d’autres sont allés chercher d’autres sauveurs dans notre histoire française.

Cette naïveté politique, récurrente dans mon parti et qui l’a fait souvent trébucher, notamment lors de l’alignement historique sur l’URSS de Staline pendant vingt ans (à la louche), a toujours été payée très cher, pas sur le champ, mais à long terme. L’analyse sur ce sujet n’a pas encore été assez loin pour mieux comprendre ses effets sur le reflux du vote communiste en France depuis les années 1980.

J’ai moi-même joué le jeu du Front de Gauche, qui apportait un peu de fraîcheur dans un contexte politique où les socialistes se vautraient majoritairement dans le social-libéralisme. Ce que nous n’avions pas compris, c’est que ce Front de gauche n’était qu’un marchepied pour un aventurier politique socialiste qui avait une toute autre ambition que de travailler avec les communistes. Il est arrivé en partie à ses fins et un certain nombre de communistes qui se sentaient orphelins d’une grande histoire l’ont suivi lorsqu’il a créé la France Insoumise sous une forme verticale, avec une direction non révocable et sans adhérents cotisants. Il a ensuite surfé sur la vague d’un populisme de gauche (qui n’a rien de radical en fait, encore moins « extrémiste »), surtout quand on sait que le programme de la FI est très influencé par l’idéologie rocardienne du Parti Socialiste. Il a donc gagné un pari qu’il a transformé avec la venue en masse de députés LFI à l’Assemblée nationale, la porte du Sénat lui étant fermée parce que son mouvement trop récent n’a jamais pu avoir d’implantation territoriale significative, contrairement aux socialistes, aux communistes et aux verts.

Son excitation par des phrases assassines contre les dirigeants politiques du PCF, Pierre Laurent d’abord et Fabien Roussel ensuite était due à son impatience de voir disparaître la tradition communiste française, telle qu’elle avait évolué depuis la signature du programme commun de la gauche en 1972. Il est tombé sur un os, un « provincial » du Nord qui, malgré une grande difficulté à faire remonter l’influence communiste, a résisté, avec la nouvelle équipe élu au congrès du PCF, à son rouleau compresseur, certes avec une autre forme de populisme bon enfant très apprécié dans les médias, sans pour autant l’être sur le programme politique proposé, mais suffisamment dissocié de la rhétorique LFI pour que les Français fassent la différence.

Je ne sais pas ce que sera l’avenir des partis de gauche, tels qu’ils sont aujourd’hui. Personne ne le sait d’ailleurs. Mais ce que l’on sait déjà, c’est qu’avec un PCF trop faible dans la coalition actuelle du NFP, on tourne en rond avec une influence qui ne dépasse pas les 30 % de la population et des reculs programmatiques incontournables face à la pression des milieux d’affaires. La concurrence entre le PS et LFI ne fait que renforcer cette tendance à l’immobilisme des comportements sur fond de méfiance réciproque.

Une chose est sûre, qui s’est révélées lors de la dernière fête de l’Humanité, la tradition communiste française a une potentialité dont beaucoup de communistes eux-mêmes à qui on serine tous les jours qu’ils ne sont que 2 % ne semblent pas croire.

À ceux-là je dis que c’est le moment de sortir du doute, parce que mouvement social peut leur permettre d’apporter une contribution originale et réellement révolutionnaire, dans le souffle des idéaux de la Commune de Paris dont se sont inspirés les leaders du Front Populaire et du CNR…

Lorsqu’André Chassaigne a décidé de démissionner de l’Assemblée nationale, il a fait un geste plus que symbolique, celui du relai aux nouvelles générations pour qu’elles fassent leur expérience et qu’elles l’assument. Dans un autre sens, Mélenchon l’a fait aussi, mais pour une autre raison. Il veut être Président de la 5e République et naviguer au-dessus des péripéties comme un roi soleil, en ayant éliminé toute diversité dans la gauche française, dans le droit fil d’une aventure de type napoléonien, pas André Chassaigne, républicain jusqu’à l’os.

Est-ce à dire que j’aimerais André et haïrais Jean-Luc ? Cela n’a rien à voir. Sachons différencier la représentation du mouvement des idées et l’intégrité des personnes dont la vie privée doit être respectée. J’ai moi-même des amis Insoumis, PS ou verts ou proches de ces mouvements que j’aime beaucoup et je sais faire la différence entre le débat politique et les valses de la haine gratuite dans laquelle les réseaux sociaux jouent un rôle qui n’aide pas au rassemblement. J’avoue que je me fais piéger parfois, mais, comme le dit la conclusion d’un film que je vous recommande pour passer vos colères, « Certains l’aiment chaud », personne n’est parfait

Yvon Huet

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