Le billet d’Yvon Huet. Se poser les bonnes questions (en toute modestie…)

Certains disent que le vote du budget de la Sécu est une déclaration de guerre contre le monde du travail et la démocratie sociale. Ils ont raison, mille fois raison. Mais il faut se demander le pourquoi du comment de ce vote de l’Assemblée plutôt que de ruer dans les brancards d’une armoire fermée par le clanisme populiste ou ramper face aux exigences de la table des privilégiés de la finance.

La raison essentielle qui explique le vote du budget, c’est le rapport de force actuel où le mouvement social piétine dans une résistance très minoritaire face à l’apathie générale qui envahit les chaumières où le chacun pour soi est devenu la règle obligée. Le nier, c’est se mentir à soi-même.

Malgré un effort très méritant des organisations syndicales, particulièrement la CGT, pour mobiliser les citoyens contre le projet de budget imposé par une gouvernance qui prépare sa guerre contre les peuples, et pas seulement le nôtre, la réplique résistante est beaucoup trop isolée. Ne pas le reconnaître, c’est nier la réalité, donc se tromper d’analyse et de stratégie.

Certes, se défouler sur le Parti socialiste est devenu un sport de compétition à essayer de savoir qui aura la médaille d’or de l’expression graveleuse. Et après ? La social-démocratie a toujours fonctionné avec le rapport de force. Quand le peuple revendiquait, elle penchait à gauche. Quand le peuple se taisait, elle penchait à droite… Doit-on nier cette évidence ?

Reste ceux qui sont dans le doute, environ une quarantaine de députés issus des mouvances communistes, écologistes et socialistes se sont réfugiés dans l’abstention. Consciemment ou non, ils n’ont pas voulu mêler leurs voix à celle des droites extrêmes qui représente à l’AN plus que toute la gauche réunie. Ils doivent penser que le rapport de force actuel impliquant une nouvelle élection législative qui piratera les élections municipales déjà difficiles dans un contexte de crispation guerrière entre LFI et le PS qui a fait exploser le NFP finira par une victoire sans partage de l’extrême droite. Doit-on les condamner pour cela ?

Pas simple, d’autant que le texte du budget envoyé au Sénat risque de revenir encore plus anti-social qu’il ne l’est en regard des quelques concessions arrachées par la gauche dans les amendements.

Plutôt que d’essayer de crier plus fort que les loups du fascisme rampant qui ont envahi les médias, c’est plutôt le moment d’essayer de comprendre ce qui se passe sur le terrain de la vie. Pourquoi les gens ne bougent pas, hormis les convaincus d’avance, quand un budget proposé aux Français va leur enlever l’essentiel de la protection sociale à laquelle ils ont droit ?

Il n’y a pas de réponse toute faite mais au moins un constat. La 5e République arrive au bout du rouleau de son histoire. Entre autoritarisme accentué menant au totalitarisme des héritiers de Pétain d’un côté et Révolution partageuse et démocratique de l’autre que seul un mouvement social puissant et unitaire pourrait initier avec, en cadeau de mariage, une gauche réconciliée, les Français auront à choisir parce que le marais du milieu s’est noyé dans la tempête des crises d’un système capitaliste qui se raidit en vieillissant.

Je peux me tromper d’analyse et je ne cherche pas à imposer mon ressenti. Mais j’ai appris après près de 60 ans de participation à la lutte politique et sociale que la réflexion posée vaut mieux que le pugilat des insultes qui pleuvent et s’évaporent aussi vite qu’elles sont tombées et permettent aux puissants de continuer à dormir sur le magot de leur vol à mains armées.

Au-delà de notre crise franco-française, il faut aussi réfléchir aux conséquences du succès des extrêmes droites sur la planète, aux USA, en Europe et même en Asie. Quelle réponse internationaliste pouvons-nous y apporter sans tomber dans le repli populiste ? Ce n’est pas une question annexe. Elle fait partie d’un ensemble où il faut faire du neuf et construire les bases d’une nouvelle internationale solidaire et progressiste.

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. Perpignan : le ridicule tue !

Quelques articles de presse évoquent la facilité avec laquelle Louis Alliot, chantre du RN, risque de renouveler son mandat à la mairie de Perpignan. Même pas la peine de coller des affiches ! Pourquoi, parce que dans ce cas de figure, trois listes de gauche concurrentes se présentent dont le but est de savoir laquelle sera devant les autres, pendant qu’un piètre éditeur catholique version intégriste tente de faire valoir la droite dite « classique »…

On peut créer toutes les coordinations possibles pour tenter de faire reculer la tentation totalitaire à la française, mais si elles ne sont pas accompagnées d’une responsabilité politique de ceux qui se disent garants de la démocratie sociale et culturelle sur le terrain municipal, on n’en sortira pas et les dégâts seront lourds de conséquence. Je sais qu’à leur niveau les communistes de mon département des Pyrénées-Orientales ont tenté quelque chose pour rapprocher les points de vue, mais en vain. Ils ont dû faire le choix d’un moindre mal certes, mais cela ne règle pas le problème de fond qui écarte les classes populaires du vote à gauche, même pour des élections municipales.

On ne doit pas comparer cette situation au terrain législatif d’une autre nature où nous devrions avoir la possibilité de voter pour la tendance politique que l’on veut, ce qui n’est pas le cas, les dits « gros » bataillons qui crient plus forts que leur ombre ayant une tendance récurrente à écraser les petits d’un moment d’histoire politique d’une République en dérive.

Depuis quelque temps, j’écris des billets plutôt pessimistes sur l’existant… J’espère toutefois me tromper, sachant qu’en cas de recul cuisant d’une démocratie déjà bien abîmée avec un Président qui prépare sa guerre avec la Russie sans consulter qui que ce soit pendant qu’il laisse la gouvernance gérer l’offensive austéritaire dont il a besoin pour justifier son attitude criminelle vis à vis de toutes les générations, je serai du côté de celles et ceux qui résisteront. Je ne fuirai pas.

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. L’avenir en résistance, il n’y a que cela de vrai

La journée d’hier a démontré à quel point le matraquage idéologique et la pression qui tétanisent les citoyens provoque ses effets. Le tableau négatif d’une gauche à 30 % dans un contexte appelant à la désespérance est lourd comme une porte de prison. Ceux qui ont manifesté le 2 décembre 2025 n’en ont que plus de mérite. Pas étonnant aussi que Sophie Binet soit attaquée frontalement par les roquets du patronat.

Le combat pour renverser le cours des choses sera long et dur. Il faut l’accepter. Les experts de la parole devront se résoudre à reconnaître que sans les luttes du monde du travail ils resteront enfermés dans la cellule confortable de leurs illusions.

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. J’ai mal à la Palestine…

J’ai pu voir le film « Put your soul on your hand and walk (Mets ton cœur sur la main et marche) » hier au cinéma le Castillet dans le cadre d’une initiative de la LDH 66, d’Amnesty International et de l’AFPS (Association France Palestine Solidarité). Fatem, femme journaliste palestinienne, témoigne de la violence de l’occupation israélienne qui détruit tout, massacre à tout va et réduit à la famine les survivants d’un véritable génocide. Cette résistante courageuse qui s’ajoute à tous les martyres de la Palestine n’y survivra pas, écrasée à l’automne 2024 dans son appartement avec sa famille sous les bombes de l’armée israélienne.

Le dialogue en visio au téléphone entre la réalisatrice documentariste franco-iranienne, survivante de la répression de Mollah en Iran, Sepideh Farsi, donne la dimension de cette catastrophe humanitaire orchestrée par Israël, avec la complicité des USA et de l’UE. Ce film peut s’adresser particulièrement aux spectateurs occidentaux qui ne seraient pas encore convaincus de l’étendue des crimes de guerre de la gouvernance israélienne… Même si le contexte est bien différent, j’ai le même sentiment d’écœurement que j’ai eu autrefois en allant voir le film Nuit et Brouillard auquel m’avait amené ma mère quand j’étais adolescent.

Je ne dis pas que c’est la même chose, mais ça y ressemble terriblement. Ceux qui ont organisé le génocide, ce qui n’excuse pas le pogrom du Hamas du 7 octobre, ne valent pas mieux que ceux qui ont ensanglanté l’Europe pendant la Deuxième Guerre mondiale au nom d’une autodéfense raciale qui fait oublier que les Juifs et les Palestiniens sont des cousins autant que les Ukrainiens et les Russes au même titre que les Allemands étaient les cousins de tous les peuples européens qui les entouraient… Il est temps de faire taire tous les faiseurs de haine qui, dans le monde, précipitent l’humanité dans le gouffre d’une barbarie dont elle ne sortira que les pieds devant.

À voir et à faire voir sans modération

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. De la vague brune au tsunami ? Comment en sortir ? Contribution

Les deux derniers votes de l’Assemblée nationale, l’une sur les conditions de l’immigration algérienne statué en 1968 et l’autre sur la question de l’imposition des riches en disent long sur la suite qui risque bien, dissolution ou non, présidentielle ou non, de nous faire passer une période telle que nos anciens l’on connue, adaptée à notre temps certes mais toute aussi contraire au désir d’humanité pour lequel nos anciens se sont battus quand ils ont abattu la bête immonde du nazisme.

Le grand rêve nationaliste et fascisant d’une Europe de l’ordre « blanc » telle qu’elle se dessine dans la majorité des pays européens marque des points, avec quelques résistances certes, en Irlande et en Espagne, mais le temps a la couleur du vert de gris, en France, en Italie, en Belgique, en Suède, en Allemagne, en Pologne, en Hongrie et en Roumanie et j’en passe.

Les raisons sont multiples et ce n’est pas en se rabattant sur une nième polémique pour savoir quel serait le responsable d’une telle situation qu’on créera les conditions de la résistance et de la préparation d’un avenir plus encourageant pour les nouvelles générations. Il est nécessaire, et je parle pour moi comme pour les autres, de prendre la mesure de ce qui nous attend pour s’y préparer et trouver la parade. Ma réflexion n’est pas faite pour me faire plaisir mais essayer de service à cela.

Ulysse, quand il était confronté à la colère des dieux qui avaient peur de sa capacité à les remettre en cause, utilisait une arme efficace issue de ses cellules grises, l’imagination et la ruse, qui lui permettaient de trouver à chaque fois la parade pour échapper à leur foudre. Dans le même esprit, il faudrait que l’imagination revienne, sur le devant de l’histoire. En la matière, elle sera plus utile que l’IA.

Plus récemment, par-delà la littérature de nous sources, l’être humain a été capable d’une capacité de résistance que nous ont prouvée des êtres humains comme Henri Krasucki et tant d’autres, pour reprendre une image qui m’est particulièrement sympathique. Ceux qui ont le vrai pouvoir sur la société, les ultra-riches de la caste financière internationale avec leurs tentacules français pour ce qui nous concerne, savent utiliser et gérer ce qui marche toujours, les peurs, après avoir enlevé aux citoyens, à force de pression médiatique permanente, toute capacité de remise en cause de ce qu’ils subissent, socialement, économiquement et culturellement.

Les politiques qui se succèdent au pouvoir ne sont que leurs marionnettes, qui sont jetées orties quand elles ne servent plus pour être remplacées par d’autres. La démocratie, dans ce cadre, n’est qu’un spectacle drolatique qui exhorte les gens à demander, je me répète, l’ordre, des crottes de chien à la mise au pas de tout ce qui pourrait apparaître comme étranger, marginal, voire tout simplement original. Cette tendance a bien été exprimée en littérature par Franz Kafka et d’autres, d’une société où l’individu doit être un sujet obéissant et non un citoyen agissant. Nous y sommes.

Au-delà d’une gauche qui se perd à force de se chercher dans le cadre d’une Ve République autoritaire et décadente, il faudra chercher les forces de résistance au-delà des critères actuels de reconnaissance, sachant que les contre-pouvoirs devront reprendre l’initiative du courage contre la passivité qui, très majoritaire dans le pays, sert d’engrais à ceux qui piaffent d’impatience à prendre le pouvoir, j’entends le RN et désormais ses alliés qui vont de la droite dure à une grande majorité de ce qu’on appelle « la macronie ».

La résistance peut être joyeuse, à condition toutefois de ne pas se tromper de siècle. Nous sommes au XXIe siècle, dans une première partie qui ressemble certes à celle du XXe, avec une différence immense : la planète est un immense village où ce qui se passe dans un de ses quartiers a des effets de domino sur les tous les autres, avec conséquences immédiates. Une France fasciste « à la Française » risque bien d’emporter l’Europe dans une aventure qui obligera les nouvelles générations à sortir de leur réserve… Petits soldats ou citoyens, il faudra qu’elles choisissent.

Les communistes appellent cela la lutte des classes. Elle a en effet changé de forme, mais elle n’a jamais été aussi prégnante à un moment où le capitalisme cherche un nouveau souffle pour s’affirmer indestructible. L’alternative sociale et démocratique, qu’on peut appeler dans sa version noble, le socialisme, ne peut se construire que dans la résistance, de Brest à Vladivostok, d’Oslo à Johannesburg et de San Francisco à Pékin, sachant que la majorité des gouvernances actent aujourd’hui une nouvelle forme de relation qui remet en cause la domination dite « occidentale » ce qui est mieux que rien mais limité. Ce n’est qu’une alternative géopolitique. Elle ne suffira pas à libérer les exploités de la planète de leurs chaînes, même si on peut la souhaiter.

Le communisme n’est pas un modèle de société. C’est une démarche dont le but est d’aider les peuples à se libérer de la servitude, à quelque niveau que ce soit de n’importe quel stade d’évolution d’une société. Cette conception est française, issue de ses processus de révolution et de luttes politiques et sociales, très différente de celle des Chinois et des Russes qui confondent « classe ouvrière » et appareil d’État. L’histoire dira qui avait raison… Je me range à la française sans pour autant mépriser qui que soit qui pense autrement. Encore une fois, le débat d’idée sera toujours plus constructif que la polémique qui fige les rapports humains.

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. T’as pas 500 milliards ?

Mai si ! Il suffit de traverser la rue
Et de braquer les ultra-riches
À la source de leurs revenus…

Je lis avec intérêt les interventions de mes camarades communistes et syndicalistes. J’y vois source de solidarité et de réflexion commune. Juste une remarque, sans les heurter bien sûr d’autant que je m’inclus à la critique que je fais. Je lis 80 % de condamnations, d’analyses sur les coups bas en mitraille de la gouvernance, de la nécessité de résister. C’est bien mais quid des propositions alternatives ? Je lis certains se référant au programme du NFP, sachant toutefois que s’il n’y a pas réflexion et travail en commun ce n’est qu’un chiffon de papier déjà complètement dépassé. J’en lis d’autres reprenant les revendications syndicales de la CGT. C’est bien, mais cela ressemble à un rêve non achevé face au mur bien solide de la caste financière.

En matière d’alternative sociale et politique il y a certes beaucoup de choses à lire. La majorité des propositions, y compris à gauche, sont d’une étonnante timidité, parce qu’elles sont en fait uniquement fondées sur une résistance et non sur une contre-offensive.

J’avoue ma préférence dans le projet du PCF qui propose un investissement de 500 milliards pour créer un véritable rebond économique, social et démocratique de notre pays, la France, qui continue à couler dans le marais de l’austérité à perpétuité que nous propose la Macronie et que le RN reprendra en y ajoutant la chasse aux pauvres et aux migrants s’il arrive au pouvoir.

Ce n’est pas un chiffre jeté dans le poulailler pour satisfaire les gallinacés. C’est le produit d’une réflexion posée qui lance le pari de l’audace contre l’aménagement. C’est un projet révolutionnaire. Certes, il mérite approfondissement, mais il est le seul à prendre le contrepied du bourbier ambiant qui nous met terriblement sur la défensive. Plus encore, il permet aux revendications des syndicalistes de trouver un cadre sérieux de débat et d’action concrète sur les urgences autant que sur les perspectives à moyen et long terme. Le projet des communistes mérite mieux les litanies qui se comprennent certes mais ne font pas avancer les choses.

En même temps, il faudra résister certes, mais il ne faudra jamais perdre la boussole des jours heureux. L’autocensure de certains de mes camarades à ce sujet me désespère, parfois. Je ne les cite pas. Ils se reconnaîtront et je n’en veux à personne parce que je crois au débat, pas à l’invective et à l’humiliation des autres.

Yvon Huet

Le Billet d’Yvon Huet. Billard à trois bandes…

Quand le PS joue les facilitateurs pour sauver la Macronie, il favorise la confrontation de LFI, seule contre tous et du RN avec le risque probable d’un rassemblement des droites pour confirmer la fin de la démocratie…

Quand la Macronie rapproche son programme de celui du RN au point de ne plus savoir où sont les nuances, elle favorise l’entrée en fanfare du RN à l’Élysée et à Matignon…

Quand LFI joue le maximalisme de façade en jouant solo et en humiliant systématiquement le reste de la gauche dans la majorité des circonscriptions et assemblées territoriales, elle favorise un score ubuesque du RN qui risque de remporter le morceau plus encore qu’hier, à l’Assemblée nationale et dans les municipalités.

Cette situation risque bien, dans ces trois cas de figure, de finir en catastrophe démocratique annoncée…

Sur ce coup, vous avouerez que malgré ses tentatives répétées et affichées pour arrêter ce billard à trois bandes mortifères, le PCF n’a aucune responsabilité dans ce fiasco annoncé particulièrement lassant dans les relais médiatiques qui ne se privent pas pour enfoncer le clou d’une débâcle à gauche. Ne serait-ce que pour cela, je conseille à mes contacts de plus et mieux le soutenir, même s’il peut y avoir des désaccords sur tel ou tel sujet. Au PCF, on n’exclut pas. On réfléchit, on débat et on soutient toutes les luttes populaires pour le progrès social et pour la paix.

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. Trou noir ou révolution ?

La France a connu, depuis la fin du XIXe siècle, 5 républiques. Elles ont toute fini par un retour de l’autoritarisme, à des niveaux différents certes, mais toujours dans le même sens. La première, de 1792 à 1804, broyée par Napoléon Ier, la seconde de 1848 à 1852 broyée par Napoléon III, la troisième, de 1870 à 1940, la quatrième, de 1945 à 1958 broyée par le Général De Gaulle qui a instauré une République présidentielle autoritaire par un coup d’État institutionnel avec la complicité du socialiste Guy Mollet. Nous arrivons aux termes de la 5e République…

L’enjeu est de taille. Les citoyens, dont la majorité écrasante semble avoir perdu la mémoire historique, sont confrontés à un choix crucial, soit l’initiation d’une République sociale et représentative, donc démocratique, certes imparfaite –il faut se méfier de la perfection en la matière parce qu’elle est souvent synonyme d’autoritarisme– mais vivante de la diversité du peuple français et ouverte et solidaire avec les peuples du monde, soit à la conclusion qu’ont connu les quatre premières républiques, dans une version de plongée vers un État autoritaire rabougris et terrorisant, initié par une alliance de plus en plus claire entre droite et extrême-droite, avec les compliments des milieux d’affaires du grand patronat et de la finance, comme aux « bons vieux temps hitlériens ». Cette conclusion glauque ne peut en aucun cas faire rêver d’un retour démocratique rapide.

Aurait-on oublié qu’en Espagne, Franco, après avoir assassiné la République et après avoir exterminé des millions de gens attachés à la démocratie, est resté debout avec l’aimable complicités des USA et de l’Otan pendant 40 ans ? Soit dit en passant, nos amis espagnols doivent être particulièrement étonnés et déçus, vu l’idée qu’ils ont toujours eu d’une France républicaine et généreuse, particulièrement les républicains catalans, de voir Perpignan finir en place forte de l’intégrisme catholique d’extrême droite…

Ne l’oublions pas. Aujourd’hui, les amateurs de pouvoir fort osent tout. Les menaces de l’extrême droite contre le Mémorial de Rivesaltes, lieu de mémoire mettant en évidence l’horreur de l’enfermement des « indésirables » ne sont pas innocents.

Merci aux aboyeurs de la cacophonie à gauche d’arrêter de brouiller la voix nécessaire d’une urgence démocratique et sociale à construire contre ce qui nous pend au nez. Ceux qui pensent qu’on peut éviter ce qu’ont connu nos anciens par des pirouettes finiront à la casserole comme les autres. Nous sommes au temps de la résistance démocratique, sociale et environnementale (ne l’oublions pas). Il faut la mettre en musique sur le terrain des luttes. Comment la nommer ? 6e République ? Pas forcément. Ce qu’il faut surtout, c’est en changer le fonctionnement. Demain sera une démocratie si le peuple le permet par un comportement qui le sorte de sa léthargie et son dégoût récurrent de la politique. Faute de quoi, l’option du trou noir risque bien de ne pas être évitable. À nous de tout faire pour l’empêcher, chacun avec ses petits moyens qui ne peuvent être grands que dans le respect de chacune et chacun.

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. Personne n’est parfait

Il m’est souvent arrivé d’écorcher l’aura de quelques leaders politiques, de gauche comme de droite, particulièrement un certain Mélenchon qui pourrait être mon petit frère de deux ans de moins… Je ne fais pas une fixation loin de là et je n’ai contre la personne que je ne connais pas personnellement aucune revanche personnelle à prendre sur quoi que ce soit.

J’en viens à ce qui me chagrine le plus en fait. Quand Marie Georges Buffet, secouée par le score catastrophe de l’élection présidentielle de 2007 avec 1,9 % des votants dans un contexte d’avancée fulgurante du vote FN, elle est allée chercher un éventuel sauveur d’une situation politique désastreuse à gauche comme d’autres sont allés chercher d’autres sauveurs dans notre histoire française.

Cette naïveté politique, récurrente dans mon parti et qui l’a fait souvent trébucher, notamment lors de l’alignement historique sur l’URSS de Staline pendant vingt ans (à la louche), a toujours été payée très cher, pas sur le champ, mais à long terme. L’analyse sur ce sujet n’a pas encore été assez loin pour mieux comprendre ses effets sur le reflux du vote communiste en France depuis les années 1980.

J’ai moi-même joué le jeu du Front de Gauche, qui apportait un peu de fraîcheur dans un contexte politique où les socialistes se vautraient majoritairement dans le social-libéralisme. Ce que nous n’avions pas compris, c’est que ce Front de gauche n’était qu’un marchepied pour un aventurier politique socialiste qui avait une toute autre ambition que de travailler avec les communistes. Il est arrivé en partie à ses fins et un certain nombre de communistes qui se sentaient orphelins d’une grande histoire l’ont suivi lorsqu’il a créé la France Insoumise sous une forme verticale, avec une direction non révocable et sans adhérents cotisants. Il a ensuite surfé sur la vague d’un populisme de gauche (qui n’a rien de radical en fait, encore moins « extrémiste »), surtout quand on sait que le programme de la FI est très influencé par l’idéologie rocardienne du Parti Socialiste. Il a donc gagné un pari qu’il a transformé avec la venue en masse de députés LFI à l’Assemblée nationale, la porte du Sénat lui étant fermée parce que son mouvement trop récent n’a jamais pu avoir d’implantation territoriale significative, contrairement aux socialistes, aux communistes et aux verts.

Son excitation par des phrases assassines contre les dirigeants politiques du PCF, Pierre Laurent d’abord et Fabien Roussel ensuite était due à son impatience de voir disparaître la tradition communiste française, telle qu’elle avait évolué depuis la signature du programme commun de la gauche en 1972. Il est tombé sur un os, un « provincial » du Nord qui, malgré une grande difficulté à faire remonter l’influence communiste, a résisté, avec la nouvelle équipe élu au congrès du PCF, à son rouleau compresseur, certes avec une autre forme de populisme bon enfant très apprécié dans les médias, sans pour autant l’être sur le programme politique proposé, mais suffisamment dissocié de la rhétorique LFI pour que les Français fassent la différence.

Je ne sais pas ce que sera l’avenir des partis de gauche, tels qu’ils sont aujourd’hui. Personne ne le sait d’ailleurs. Mais ce que l’on sait déjà, c’est qu’avec un PCF trop faible dans la coalition actuelle du NFP, on tourne en rond avec une influence qui ne dépasse pas les 30 % de la population et des reculs programmatiques incontournables face à la pression des milieux d’affaires. La concurrence entre le PS et LFI ne fait que renforcer cette tendance à l’immobilisme des comportements sur fond de méfiance réciproque.

Une chose est sûre, qui s’est révélées lors de la dernière fête de l’Humanité, la tradition communiste française a une potentialité dont beaucoup de communistes eux-mêmes à qui on serine tous les jours qu’ils ne sont que 2 % ne semblent pas croire.

À ceux-là je dis que c’est le moment de sortir du doute, parce que mouvement social peut leur permettre d’apporter une contribution originale et réellement révolutionnaire, dans le souffle des idéaux de la Commune de Paris dont se sont inspirés les leaders du Front Populaire et du CNR…

Lorsqu’André Chassaigne a décidé de démissionner de l’Assemblée nationale, il a fait un geste plus que symbolique, celui du relai aux nouvelles générations pour qu’elles fassent leur expérience et qu’elles l’assument. Dans un autre sens, Mélenchon l’a fait aussi, mais pour une autre raison. Il veut être Président de la 5e République et naviguer au-dessus des péripéties comme un roi soleil, en ayant éliminé toute diversité dans la gauche française, dans le droit fil d’une aventure de type napoléonien, pas André Chassaigne, républicain jusqu’à l’os.

Est-ce à dire que j’aimerais André et haïrais Jean-Luc ? Cela n’a rien à voir. Sachons différencier la représentation du mouvement des idées et l’intégrité des personnes dont la vie privée doit être respectée. J’ai moi-même des amis Insoumis, PS ou verts ou proches de ces mouvements que j’aime beaucoup et je sais faire la différence entre le débat politique et les valses de la haine gratuite dans laquelle les réseaux sociaux jouent un rôle qui n’aide pas au rassemblement. J’avoue que je me fais piéger parfois, mais, comme le dit la conclusion d’un film que je vous recommande pour passer vos colères, « Certains l’aiment chaud », personne n’est parfait

Yvon Huet

Le billet d’Yvon Huet. Mémorial de Rivesaltes… Un bijou de résistance culturelle

J’ai été hier, avec la délégation de la LDH66 au Mémorial de Rivesaltes pour la fête de ses 10 ans d’existence. Ce lieu concentre tous les témoignages vivants de l’indésirabilité, d’où qu’elle vienne, avec le soutien de la gauche qui, est, et doit rester, espérons-le, au pouvoir en Occitanie, ainsi que le conseil département des Pyrénées Orientales.

À noter que c’est un certain Daladier qui, en 1938, a promu une loi permettant d’enfermer dans des camps de rétention des gens sans jugement, pour se débarrasser des étrangers indésirables, d’où qu’ils viennent et quelle que soit leur origine, ce que nous a rappelé l’historien Gregori Tuba, responsable du conseil scientifique du Mémorial.

À cette occasion, la LDH, par la voix de Dominique Noguères, a réitéré son attachement à l’activité efficace et enthousiasmante de ce lieu où sont passés des dizaines de milliers d’exclus, en route pour la mort pour certains, que ce soit sur place ou envoyés dans les camps nazis.

À cette occasion aussi, notre ami Georges Bartoli a été promu Chevalier des Arts et des Lettres, distinction qu’il a acceptée, non pas pour faire plaisir à la gouvernance mais en respect de sa mère, républicaine espagnole, qui lui conseilla d’accepter les honneurs de la République Française.

Une soirée magnifique…

Un conseil, pour ceux qui peuvent. Consultez le programme du Mémorial de Rivesaltes qui organise une foule d’événements culturels et artistiques et agrège autour de lui toutes les bonnes volontés, sous la houlette de sa directrice, Céline Sala-Pons qui a décoré notre reporter et journaliste chéri, Georges, neveu du grand Josep, dont les œuvres exposées ont fait briller le Mémorial récemment.

En partage, cinq photos, dont celle de l’excellente exposition de Nicole Bergé qui a transformé en pépites de mémoire les objets enfouis sur le lieu du camp de Rivesaltes…

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Yvon Huet